La régulation des produits de santé connaît de nombreuses tensions : pandémie de Covid-19, innovations coûteuses, mondialisation des chaînes de production, concurrence exacerbée entre pays… S’y ajoute une incompréhension entre les différents acteurs, industrie, usagers, administration. L’enjeu est l’accès aux traitements innovants ou matures.
La progression dynamique des dépenses de santé est portée depuis quelques années par :
- le vieillissement de la population ;
- les progrès thérapeutiques.
La Première ministre a mis en place en janvier 2023 une mission chargée d’identifier les pistes d’amélioration du système de financement et de régulation des produits de santé, entre autres afin de lutter contre les tensions d’approvisionnement. Le rapport de la mission, rendu public le 29 août 2023, examine les difficultés actuelles et les solutions.
Période particulière, tendances de long terme
Le rapport souligne que, afin de comprendre les tensions d’approvisionnement actuelles, il faut mettre en perspective les spécificités de la période actuelle (pandémie de Covid-19, guerre en Ukraine) et six tendances de long terme majeures à l’œuvre depuis le début du siècle :
- une vague d’innovations sans précédent (génétique, biomédicaments, intelligence artificielle) ;
- des mutations majeures du secteur privé dans la santé (près de 50 groupes pharmaceutiques cotés représentent 80% de l’offre) ;
- le vieillissement de la population et l’augmentation des maladies chroniques (20,5% de la population en France est âgée d’au moins 65 ans ; les pathologies et traitements chroniques représentent les deux tiers des dépenses pour 36% des assurés, soit 24 millions de personnes) ;
- la mondialisation des marchés des produits de santé ;
- l’irruption des enjeux de décarbonation (le secteur de la santé représente en France 10% du PIB et entre 6,6% et 10% des émissions de CO2) ;
- la financiarisation du système de soins (de plus en plus d’acteurs privés interviennent sur la chaîne de valeur du soin).
La question générale de l’accès concerne plus particulièrement deux sujets présents dans le débat public récent :
- les pénuries de médicaments (niveaux d’investissements insuffisants, mauvaise anticipation de la demande, comportements de stockage…) ;
- les difficultés d’accès à certains produits de santé innovants (34% des médicaments ayant reçu une autorisation de mise sur le marché européenne entre 2018 et 2021 ne sont toujours pas disponibles pour tous les patients en France fin 2022).
La mission constate par ailleurs que les coopérations entre acteurs sont dégradées (ministère de la santé, professionnels, entreprises du secteur, associations de patients…).
Convictions pour un New Deal
La mission fait part de questions centrales afin de construire un New Deal avec tous les acteurs des produits de santé, permettant de concilier objectifs sanitaires, industriels, écologiques et financiers :
- l’accès des patients à tous les produits de santé ;
- le respect des bonnes pratiques de la Haute Autorité de santé (HAS) et des sociétés savantes pour maîtriser volumes et coûts ;
- l’innovation et les données de santé afin de retrouver une maîtrise des coûts et des volumes ;
- la répartition de la valeur entre les acteurs ;
- la complexité des textes et de la réglementation ;
- l’organisation des moyens de l’État pour gérer le dispositif ;
- le défi environnemental.
Les recommandations du rapport doivent servir de base au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024.
Source : Vie publique, publié le 31 août 2023